Infos climat FLASH INFO du Portail du CILSS dans le domaine du Changement Climatique et de la Gestion Durable des Terres en Afrique de l'Ouest

Adaptation agriculture pluviale

Adaptation au changement climatique pour l'agriculture pluviale

Atouts et faiblesses des techniques mécaniques de lutte contre la désertification ou d'adaptation au changement climatique au Sahel

Quelques pratique innovante d'adaptation au changement climatique au Sahel

A/ Adaptation au changement climatique pour l'agriculture pluviale et quelques pratiques d'adaptation ou gestion durable des terres (GDT) au niveau local

L'agriculture pluviale est caractérisée par la précarité climatique qui oblige les agriculteurs à mettre en oeuvre plusieurs stratégies d'adaptation afin de gérer l'eau, la terre, les nuisibles des cultures, les intrants, etc.

Quelque soit le gradient climatique, les producteurs font face aux effets souvent pervers des facteurs climatiques que sont la pluie, la température, les vents, etc. Plusieurs facteurs combinés provoquent la cause de la dégradation des terres et de l'environnement : le déboisement et la déforestation, les feux de brousse, le surpâturage, le ruissellement et l'érosion hydrique ou éolienne, la sécheresse, les pratiques agricoles inadaptées, la pression foncière, le manque de fertilisation organique, etc.

On estime que 65% des 167 millions d'hectares arables sont affectés par la dégradation (IFDC). Face donc à la crise environnementale provoquée, entre autres, par les changements climatiques, des initiatives locales, nationales, régionales ont été entreprises en vue d’atténuer et d’inverser la tendance accélérée de dégradation des ressources naturelles. Par exemple, au Niger, l’action de différents projets a permis de réhabiliter entre 1985 et 2005 au moins 5 300 000 ha de terres fortement dégradées en utilisant une gamme variée de techniques de collecte des eaux de ruissellement : banquettes, tranchées, tassa, demi-lunes, cordons pierreux (études Sahel).

Etude de cas : Identification des risques climatiques de la culture du maïs au Burkina Faso (article de Benoît SARR, Luc KAFANDO et Sanoussi ATTA ; Int. J. Biol. Chem. Sci. 5(4): 1659-1675, August 2011)

Au Burkina Faso, le maïs est cultivé dans les zones soudaniennes et soudano-sahéliennes où les conditions pluviométriques sont plus favorables. La culture est sensible aux aléas climatiques liés à la variabilité et aux extrêmes pluviométriques. L’objectif de l’étude est d’identifier les risques climatiques pour la culture du maïs. A partir des données météorologiques journalières, une analyse agroclimatique a été réalisée sur la période 1979-2008 sur six stations synoptiques. A l’aide du logiciel Instat+ v 3.036, la variabilité des précipitations et des paramètres clés de la saison agricole dont les dates de démarrage, de fin, la longueur de la saison, les occurrences de séquences sèches et la satisfaction des besoins en eau ont été analysés en termes de risques d’apparition. Les résultats ont montré que le maïs est confronté à deux risques agroclimatiques majeurs. Il s’agit, dans la zone soudano-sahélienne, des déficits hydriques imputables à des séquences sèches au cours du développement du maïs. Tandis que les excès d’eau liés à des fortes pluies ou des successions d’épisodes secs et d’excès d’eau constituent les risques en zone soudanienne. La période d’installation, le cumul pluviométrique, la longueur de la saison ne semblent pas constituer de risques agroclimatiques majeurs pour le maïs. (Pour consulter l'article)

Synthèse de la dégradation des terres dans certains pays

Tableau 1 : Estimation des proportions de terres dégradées et restaurées dans 3 pays du Sahel (source : synthèse du CRA/CILSS réalisée par Prof Atta Sanoussi, 2012)

Pays

Terres arables

(Ha)

Terres dégradées

(Ha)

Terres restaurées

(Ha)

Sénégal 3 805 000 2 400 000 9 000 (focus sur les Niayes, fixation de dunes)
Burkina Faso  9 000 000 500 000 (Plateau central) 300 000 (Plateau central, OUEDRAOGO, 2005)
Niger 14 484 000 3 900 000

RNA > 5 000 000

Autres = environ 300 000


En zone sahélienne ou soudano-sahélienne, la production agricole est ardue dans un contexte d'incertitude climatique, de poches de sécheresses entraînant la fonte des semis et desfois un arrêt prématuré de l'hivernage. Les aménagements des sols fortement dégradés nécessitent de la forte main d'oeuvre et des investissements auxquels les producteurs souvent démunis ne peuvent réaliser.

Les moyens de travail usuels du sol (daba, charrue, etc) ne permettent plus au producteur de faire face aux changements globaux. En outre, les problèmes de fertilité des sols se posent avec acuité dans un contexte de changement climatique, de réduction (voir suppression) de la jachère, la rareté de la matière organique en général et du coût élevé des engrais chimiques en particulier.

Afin de faire face au changement climatique, les producteurs adoptent plusieurs techniques de production. Dans les zones sableuses, ils font recours aux techniques de fixation des dunes, les brises vents, la fumure organique, la régénération naturelle assistée, etc. Dans les zones peu sableuses (argilo-sableux, argileux), les usages d'une mosaïque de techniques sont constatés. Il s'agit du zaï ou Tassa (au Niger), des cordons pierreux, des demi-lunes, des banquettes, du tapis herbacé, de la fertilisation organo-minérale, etc (cf. tableau ci-dessous). Au Niger, l’augmentation des rendements grâce aux aménagements CES est évaluée selon les régions à 15 à 50 % pour le mil et à 20 à 85 % pour le sorgho. En revanche dans les villages témoins on assiste plutôt une baisse considérable des rendements des céréales. Selon les localités, cette diminution est de 25% à 60 % pour le mil et 40% à 70 % pour le sorgho (études Sahel).

On citera notamment celles présentées par les divers travaux du CILSS (études Sahel, le projet IEM LCD, le PGRDT) ou encore le document récent conjoint FAO TerrAfrica. Dans le cadre de la mise en oeuvre du projet "capitalisation des actions d'amélioration durable de la fertilité des sols  pour l'aide à la décision au Burkina Faso (FERSOL)", le CILSS a appuyé la production de 3 livres décrivant les expériences des producteurs dans l’amélioration des sols destinés à l’agriculture, à l’élevage et à la foresterie au Burkina Faso concernant la période depuis 1980 jusqu’à nos jours. Ces livres concernent les zones agro-écologiques centreouest et sahel. En outre le CILSS a mis en ouvres plusieurs fiches

Le CILSS a publié deux manuels de formation pour appuyer les différents acteurs de terrain. Il s'agit des documents suivants : "Comment utiliser les matériaux locaux pour construire une fosse fumière" et "Comment produire du compost à l'air libre avec la paille".

techniques destinées aux producteurs : 

- récupération mécanique des sols à des fins agro-sylvo-pastorales ;

 - comment récupérer les terres totalement dégradées et dénudées ou zippélés  par la technique du tapis herbacé ;

 - comment cultiver des herbes comme Andropogon gayanus pour lutter contre l'érosion et pour mieux nourrir les animaux ;

 - comment fixer les dunes pour freiner l'ensablement des pâturages et des cours d'eau,

 - techniques d'agriculture de conservation.

Tous ces produits du CILSS  peuvent servir aux producteurs des pays du Sahel concernant les adaptations en zone climatique sahélienne, soudano-sahéliènne et soudanienne. Les techniques sont diversifiées en fonction des zones agro-écologiques et sont de plusieurs types : biologiques, mécaniques, etc. Les aménagements physiques des terres pour gérer l'eau nécessitent un accompagnement en fertilisation organique et/ou minérale, les traitements phytosanitaires dans certains cas et l'usage des variétés améliorées de semences ou de plant.  La diffusion de la technique de la microdose d'engrais au poquet ces dernières années permet une meilleure gestion des engrais chimiques. Elle a été promue par l'International Fertilizer Development Center (IFDC) et l'Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA).

B/ Atouts et faiblesses des techniques mécaniques de lutte contre la désertification ou d'adaptation au changement climatique au Sahel

Techniques

Description                                        

Atouts                 

Faiblesses                     

 Couts                       Illustration

Zaï

C’est une technique de récupération des sols encroûtés qui consiste à creuser des trous de 20 à 40 cm de diamètre et de 10 à 15 cm, à l'aide de divers matériels (pioche, pique, barre à mines, dents spéciales, etc) afin de recueillir les eaux de ruissellement et de les laisser s’infiltrer. Dans chaque trou, le producteur y apporte une poignée de matière organiques (soit environ 600 g/trou selon Zougmoré et al., 1993 : fumier, compost, débris, etc) pour enrichir le sol avant les semis. Cette technique est très prisée en zone sahélienne.

- Augmentation des rendements agricoles

- Restauration de la végétation

- Travail en saison sèche

- Augmentation de l’infiltration de l’eau

- Durée des temps de travaux

- Inadaptation aux sols sableux

- Efforts physiques importants

- Disponibilité de matière organique et transport

- Nécessité de travaux associés : cordons pierreux

Petit matériel pour creuser et charrette pour le transport du fumier.

Environ 75 euros/ha.

Demi-lune

 elles sont des aménagements en demi-cercle de diamètre et de 15 à 25 cm de profondeur permettent de collecter les eaux de ruissellement et sont ainsi bien adaptées aux zones semi-arides et arides .La terre de déblai est déposée sous forme de bourrelet permettant de conserver l'eau. Les demi-lunes sont disposées en courbe de niveau, en quinconce et recueillent le ruissellement de l’eau qui s'y infiltre. Elles sont réalisées sur des glacis recouverts d’une croûte dure de quelques cm rendant le sol imperméable.  Elles permettent de collecter les eaux de ruissellement et sont ainsi bien adaptées aux zones semi-arides et arides.

- Absorption de l’eau de ruissellement

- Lutte contre l’érosion

- Augmentation des rendements agricoles

- Restauration de la végétation

- Gros efforts de main d’œuvre

- Formation pour les courbes de niveau

- Disponibilité de la matière organique

- Sécurité foncière

 Petit matériel pour creuser, niveau à eau et charrette pour amener le fumier. Environ 75 euros/ha  

Cordons pierreux

 Il s'agit d'ouvrages anti-érosifs constitué de pierres de différentes formes et poids, réalisé en courbe de niveaux dans les champs paysans afin de réduire le ruissellement et l'érosion des sols.

Augmentation des rendements agricoles- Restauration de la végétation- Travail en saison sèche- Infiltration - Rareté et éloignement des pierres- Insuffisance des moyens de transport- Nécessité de la main d’œuvre- Entretien- Engorgement en année pluvieuse  Matériel de concassage des pierres et de mesure de la pente, camion et charrettes pour transport des pierres.Selon la distance des carrières, le cout varie entre 130 à 250 euros/ha  

 

 

 

Diguettes en terre  Les diguettes en terre sont des ouvrages imperméables, qui retiennent toute l’eau et favorisent son infiltration maximale. L’installation consiste à confectionner un bourrelet de terre dont la base mesure 80 cm à 1 m et la hauteur moyenne est de 30 à 50 cm (et à aménager des passages d’eau (2 m de large) avec des pierres ou des herbacées pour évacuer le trop plein et éviter les brèches et les inondations en amont. Pour des raisons d’entretien permanent, les diguettes en terre sont progressivement abandonnées par les projets de développement rural. - Conservation de l’eau- Facilité de réalisation - Nécessité d’un entretien constant- Faible efficacité (brèche, etc..)- Nécessité de gros matériel (tracteur)- Engorgement    
Paillage Le paillage consiste à recouvrir le sol d’une couche de 2 cm environ d’herbes équivalant à 3 à 6 t/ha ou de branchages ou encore de résidus culturaux (tiges de mil ou de sorgho) de façon à stimuler l’activité des termites. - Protection du sol/révégétalisation ; Réduction de l’évapotranspiration ; Stimulation de l’activité biologique ; Augmentation de la porosité du sol ; Amélioration de la fertilité du sol ; Augmentation des rendements - Disponibilité limitée des résidus- Problème de transport quais nulle (utilisation des tiges de céréales et main d'oeuvre locale   
Compostage Le compostage                       est un procédé biologique de conversion et de valorisation des matières organiques (sous-produits de la biomasse, déchets organiques d'origine biologique...) en un produit stabilisé, hygiénique, semblable à un terreau, riche en composés humiques, le compost. Il est une opération qui consiste à dégrader, dans des conditions contrôlées, des déchets organiques (divers résidus et du phosphate) en présence d'oxygène. Amélioration de la structure du sol, de la rétention de l'eau et de la fertilité du sol difficulté de trouver la matière organique et l'eau pour l'arrosage. Une fosse de 10 m3 permet de fertiliser env 0,5ha/an. Cout de construction, entre 45 et 90 euros selon la compaction du sol.  

C/Atouts et faiblesses des techniques biologiques

 Quelques pratiques innovantes d'adaptation au changement climatique au Sahel :

 - le bocage sahélien

 La gestion des terres agro-pastorales est une difficulté majeure rencontrée par les producteurs face aux changements globaux (pression foncière, disparition de la jachère, intensification agricole, dégradation poussée des terres, etc). C'est dans ce contexte qu'est né le bocage sahélien qui est une organisation du terroir villageois permettant une affectation et une co-gestion des terres aménagées collégialement par les producteurs. Le bocage sahélien est actuellement mise en oeuvre par la Ferme Pilote de Guié (Burkina Faso) par exemple. 

- la forte mécanisation de l'agriculture au Burkina Faso et au Niger avec l'usage de la charrue delfino

La mécanisation agricole est incontournable pour accroître les superficies aménagées et la restauration des terres dégradées suite aux changements globaux. Plusieurs types de mécanisations sont introduits par la recherche scientifique dont la culture attelée, le zaï mécanisée qui a proposé des dents (IR 12, RS8, etc), les tracteurs pour le labour des sols, etc. Ces dernières années ont vu l'introduction des charrues destinées à décompacter profondément les sols très encroûtés appelés Zippela en langue local Mooré au Burkina Faso. Ces sols complètement dénudés qui constituent une majeure partie des zones agro-sylvo-pastorales dans les zones sahéliennes, ont une carapace qui bloque l'infiltration de l'eau et inhibe le développement végétal. Abandonnés jadis par les producteurs du fait de leur faible utilité et la disponibilité de terres arables, ces sols sont devenus incontournales dans un contexte de changement climatique, de pressions foncières fortes et de meilleures connaissances des méthodes d'aménagements du milieu. Les charrues delfino par exemple sont promues au Burkina Faso par l'Etat dans le cadre de la mise en oeuvre par le Ministère de l'Agriculture et de l'Hydraulique, d'un projet de sécurité alimentaire par la restauration des terres dégradées au Nord du Pays. La charrue Delfino permet la réalisation mécanique d’ouvrages anti-érosifs ou micro-bassins sous forme de demi-lunes.. L’utilisation de cette charrue requiert un tracteur d’au moins 180 chevaux de puissance. En théorie l’unité tracteur-Delfinopeut réaliser selon la nature du sol entre 10 et 15 demi-lunes à la minute, soit environ 7000 demi-lunes par jour. L’écartement entre les lignes de demi-lunes est lié à la pluviosité. Il est préconisé un écartement de 3 à 4 m pour une pluviométrie moyenne annuelle de 300 à 350 mm et de 5 à 7 m lorsque celle-ci est de 200 mm (Hien et al., 2005). La charrue Delfino peut être utilisée sur des sols lourds, argileux à sablo-argileux et argilo-gravillonnaires, compacts à très compacts et/ou pierreux, dont la pente peut varier de 0 à 10 %. Ces sols doivent être profonds (au moins 80 cm).

- l'utilisation des plantes de couverture (exemple, Mucuna cochinchinensis et Mucuna rachida) ou de graminées pérennes (Andropogon gayanus)

La couverture permanente ou partielle du sol constitue un moyen de réduction des impacts des gouttes de pluie (effet splash) sur les déplacements des éléments fins du sol (exemple l'argile) qui constitue les éléments principaux constitutifs de la fertilité des sols. L'usage du Mucuna en zone soudanienne du Burkina Faso, du Bénin, de la Côte d'Ivoire entre autres pays, a permis aux producteurs de mieux gérer la fertilité des sols, l'eau pluviale et l'humidité. L'introduction de Mucuna permet une amélioration des rendements des cultures associées et des cultures suivantes des autres années (SEGDA, 2005) notamment par le biais des semis directs sur couverture végétale.

L'usage de la graminée pérenne, Andropogon gayanus est une initiative qui permet au producteur d'améliorer la fertilité des sols et aussi de satisfaire à certains besoins socio-économiques (artisanat, vente de la chaume, etc). L'espèce joue un rôle majeur en zone soudanienne ou soudano-sahélienne, sur la structure du sol (amélioration de la porosité notamment), l'amélioration de l'activité biologique, la réduction du ruissèlement et de l'érosion. Dans les zones sahéliennes ou soudano-sahéliennes, Andropogon gayanus est utilisée pour stabiliser les aménagements physiques de conservation des eaux et des sols notamment les cordons pierreux.

- La régénération naturelle assistée (RNA)

La RNA consiste à épargner et entretenir certains arbustes (arbres utiles et à usage multiple), de façon à reconstituer le couvert ligneux dans les champs. La présence d’arbres dans les champs contribue à freiner la vitesse des vents, ce qui limite les dégâts aux cultures au début de la saison pluvieuse. 

Un effet « tâche d’huile » à la suite du constat des impacts multiples de la RNA a contribué à une diffusion spontanée. Dans le cadre le l’Etude Sahel au Sénégal deux techniques spécifiques ont été analysés : les digues anti-sel et la fixation des dunes côtières. Une forte atténuation de l’érosion éolienne grâce aux embocagements (E. balsamifera et A. occidentale), la restauration de la couverture arborée et des pâturages ont été observées. La RNA a permis d'accroître la disponibilité de bois de chauffe (élagage de A. occidentale) supprimant ainsi sa corvée, du bois de service (plantations de E. camaldulensis et A. occidentale) et la disponibilité de pommes et noix de cajou en grandes quantités qui a permis la création d’une nouvelle filière commerciale.

                                                                                                                                                  Haut de page

FaLang translation system by Faboba